samedi 28 mars 2009

les vacances de Nicole (12)

Mardi 28.
Pour Nicole, ce fut sans doute la plus belle journée de la semaine, et certainement de toutes ses vacances, comme quoi elle aurait eu tort de se lamenter sur l'absence de Manuel.
José est venu la chercher à 10h, avec la voiture de sa voisine. Ils sont allés directement en Espagne, à Figueras. Le temps qu'il aille signer un papier à la banque (une histoire d'héritage, semblait-il) et les voilà rendus au musée Salvador Dali.
Elle connaissait l'édifice de réputation, pour l'avoir vu dans divers bouquins d'art. Elle fut émerveillée. Pour elle, Dali était le seul vrai surréaliste, c'est-à-dire le seul artiste surréaliste qui ait fait de sa propre vie un hymne au surréalisme au point de se faire virer par les surréalistes eux-mêmes. Il ne pouvait donc se construire un sanctuaire qu'à la mesure de son génie. Et pour elle, un chef d'oeuvre absolu. Non pas un foutoir ou un attrape-nigauds, mais une oeuvre construite, ordonnée, déroutante, avec une rigueur vertigineuse : le plus incroyable des parcours oniriques. Jamais elle n'avait rien vu d'aussi beau, d'aussi magique, d'aussi incontournable, d'aussi mystique. Cet amour pour Gala, cette extraordinaire communion dynamisaient ce lieu en un puissant repaire, et un authentique repère à la célébration de l'amour-fou.
Ensuite, par une chaleur écrasante mais supportable (30° à l'ombre) ils ont remonté des routes à flanc de montagne, en passant par Mollet de Peralada et Sant Pere de Rodes, à la découverte de merveilleux sites médiévaux encore intacts, ou du moins encore fiers de leur arrogance d'antan.
José fut fabuleux, roulant sans cesse en agonisant les femmes conductrices, avec une vigueur et une mauvaise foi qui amusaient beaucoup Nicole, qui acceptait ce déréglement hormonal comme faisant partie du surréalisme environnant.

Le soir, elle est allée prendre l'apéritif dans l'appartement du Trio Infernal, à 19h45. Elle avait déjà éclusé un bière bien fraîche à Port Bou, et elle était bien mûre pour faire l'andouille. Elle avait même apporté avec elle sa bouteille de Bourbon, afin de la liquider avant son départ. Jerry a tout de suite repéré qu'elle était prête à faire des étincelles. Il a servi le Bourbon pendant que les filles sortaient de la douche. Elle leur a parlé de son emballement pour le musée Dali et Jerry a de nouveau rempli les verres. Ensuite Sophie et Béa sont allées téléphoner à Betty, qui débarque jeudi matin avec Claude. Pendant ce temps, Manuel les a rejoints. José avait prévenu Nicole que dimanche soir il l'avait rencontré à Perpignan et qu'il l'avait vu sortir son couteau à cran d'arrêt et menacer deux jeunes qu'il avait pris pour des arabes. Comme il avait parlé d'apporter du shit, elle lui en a réclamé. Il a promis d'en amener jeudi soir, et Jerry était d'accord pour en fumer tous ensemble. Nicole se disait "C'est pas vrai, Manuel n'en apportera pas. Il en rajoute toujours un peu pour bien attirer l'attention sur lui, même si les autres s'aperçoivent très vite qu'il raconte des conneries". De toute façon, elle était remontée contre lui puisqu'il l'avait laissée tomber deux soirs de suite. Et, à partir de 22h, elle a commencé vraiment à déconner. Elle avait mis exprès le tee-shirt blanc (elle a horreur du blanc) qu'il lui avait offert, elle l'a enlevé et elle l'a balancé chez les voisins du dessous. Ensuite, elle est partie, laissant tout le monde en plan (connaissant Sophie, elle savait qu'elle devait être tordue de rire en la traitant de "barjo") et elle est remontée chez elle. Elle s'est habillée rapidement et Manuel l'a emmenée bouffer une salade sur le port. Elle tenait à peine debout en rentrant, mais intérieurement elle rigolait comme une cinglée. Manuel s'est écroulé sur le divan et elle s'est assise sur lui. Elle ne savait plus très bien où elle en était, mais elle voulait lui faire payer ses absences et son manque d'amour "passionnel".

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