lundi 3 août 2009

La (petite) vie de Marcel -61

Marcel fait des rêves merveilleux.
6-7-8 avril. Week-end au Havre.
Excellente interview de Rita Renoir, ce mois-ci, dans "Lui". Mais, question revue, Marcel pencherait plutôt pour "In", qu'il trouve plus imaginative.
Claudine, cette semaine, travaillait de nuit. C'est dommage car, vendredi soir, ils avaient de la visite. Après Bernard, tout le temps fourré chez eux depuis trois mois, et maintenant parti à Louviers (pour combien de temps?) c'est Willy qui rapplique, avec Sergio, un jeune coiffeur qu'ils ne connaissaient que de vue. Sergio est ébloui par l'appartement (qui n'a pourtant rien de luxueux) : par les posters de Noureev, les lampes basses, le lit à ras-du-sol. Après son verre de scotch, il se regarde le nombril. "Tu te sens bien?" lui fait Willy, de son air inimitable, tandis qu'Aretha Franklin déroule ses "most beautiful songs". Tous les trois ils repartent à Franklin (la place, évidemment) où Marcel s'amuse du manége de Willy draguant un jeune mec (marié). Comme ça dure plus d'une demi-heure et qu'il se caille les miches, il préfère rentrer.
Le samedi soir, il retrouve Willy sur la place, mais il le laisse tomber à 22h pour monter dans la voiture d'un type qui, trop flemmard pour sortir de sa chiotte, lui faisait des appels de phare.
1er épisode : "l'enthousiaste".
Monsieur est en pleine forme, "sublimé". Il tutoie Marcel, il lui tripote les mains, il s'enflamme pour cette "rencontre passagère qui s'annonce si pleine d'intérêt". Sarcastique, Marcel lui pose quelques petites questions rapides pour le situer : marié? Oui. Des enfants? Deux. "J'en ai marre des hommes mariés, mais si vous voulez on peut aller prendre un verre chez mon amie". L'autre acquiesce, souriant, empressé.
2ème épisode : "le refroidi".
A peine arrivé, il cherche à avoir Marcel, mais celui-ci reste impassible. Il a une belle gueule, mais il a un côté efféminé qui contraste avec son satut d'homme marié et de père de famille. Ils flirtent, entre vermouth, scotch et Ray Charles.
Lui : Pourquoi ne veux-tu pas faire l'amour avec moi?
Marcel : Je ne sais pas... Je ne me sens pas à l'aise avec vous...
Finalement, il lui demande de le ramener à Franklin.
3ème épisode : "le déçu".
Dans la voiture, l'homme ouvre les digues : "Quand je vais rentrer chez moi, la première chose que je vais faire, c'est de me regarder longuement dans la glace... Je dois avoir beaucoup vieilli... Je ne savais pas que je pouvais ne plus plaire".
Puis il devient méchant : "Tu veux retourner là-bas pour faire marcher un autre type comme tu me fais marcher!". Et finalement il retombe dans l'abattement : "Je suis toujours déçu avec les garçons... Je recherche une présence, une communication, j'ai besoin de compréhension...".
Marcel l'écoute parler, lui prend la main et puis, arrivés à Franklin, descendant de voiture : "Mon pauvre petit chou, la prochaine fois sera la bonne, peut-être....".
Mardi 10.
Cette nuit, il a fait un rêve merveilleux.
Il se trouvait dans une sorte de dortoir d'internat, très propre, très bien, avec une seule rangée de lits, et des fenêtres. Ils devaient, dans la première partie du rêve, sauter du haut des fenêtres sur des chevaux qui attendaient, en bas, dans une cour dénudée. Dans la deuxième partie, ils étaient étendus sur leurs lits -après-midi calme et chaude, stores baissés. La cour s'était transformée en un merveilleux jardin avec des allées ombragées de rosiers. Et tout d'un coup une voix monta du jardin, chantant un air d'opéra. "C'est La Callas!" dit Marcel extasié tandis que les internes se levaient pour se mettre aux fenêtres. C'était La Callas, en effet, et elle chantait un air tout en marchant dans le jardin. "Ce doit être Les Puritains!" dit-il. Mais son voisin de fenêtre lui dit que ce n'était pas ça : "C'est un air que nous n'avons jamais entendu auparavant". Callas chantait fort bien et un homme, descendu du dortoir, allait la courtiser. Elle le rabrouait, tout en chantant, cueillant une rose rouge et lui en frappant le visage, ou en lui pinçant fortement la taille.
Les paroles, italiennes, de son chant, s'envolèrent hélas à son réveil.
Mercredi soir (le 11 avril) il y avait un nouveau venu sur la place. Le genre Philippe, jeune et costaud. Tout d'abord, Marcel l'a pris pour un casseur, mais dans le coin où il l'observait, le mec s'est rapproché de lui et a déballé ses outils. Marcel s'écarte, prudent, méfiant. Un autre type, jeune, grand et moche, les ayant remarqués, se radine rapidement et déballe ses outils devant le mec. Marcel s'éloigne et les voit partir tous les deux. Il les suit à distance, intrigué. Ils entrent un peu plus loin dans un immeuble de la rue Thiers. Ce soir (vendredi 13) comme il arrive sur la place, qu'est-ce qu'il voit? Le jeune gars baraqué, genre-Philippe, genre-loubard, genre-pas-mal-du-tout-merci-beaucoup. Ils se reconnaissent. Comme un copain, Dominique, vient dire bonjour à Marcel, celui-ci lui demande s'il le connaît. Il lui répond que non et, soudain intéressé, il va carrément lui parler. Et il l'embarque dans sa voiture, sous le nez de Marcel, complétement dépité! Qui rentre chez lui, en colère, et se tire une carte. Et, médusé, il lit : "Vous ferez une affaire à laquelle vous associerez deux personnes dont l'une vous trompera". Il n'en croit pas ses yeux et regrette de ne pas l'avoir assez longue pour se la mettre dans la bouche et se la mordre avec vigueur.

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