mercredi 31 décembre 2008

Fin d'année (bis)

Un ami m'envoie, sans doute pour me faire rêver en cette période de fêtes, les photos et explications des différents lieux où exercent nos ministres français :
Hôtel de Bourvallais (Justice)
ex Palais Cardinal (Palais Royal - Culture)
Hôtel des Castries (Logement)
Hôtel du Châtelet (Travail)
Hôtel de Brienne (Défense)
Hôtel des Affaires Etrangères
Hôtel Beauvau (Intérieur)
Hôtel de Villeroy (Agriculture) ....
A la vue de ces intérieurs luxueux, de ces jardins resplendissants, je comprends soudain pourquoi des centaines de personnes profitent des "journées du patrimoine" pour visiter ce qui leur semble totalement inaccessible en temps normal.
Restes de royauté, affaires de pouvoir, successions d'intrigues avec personnel obligatoire, chaussures cirées et protocole de circonstance, combien de nouveaux politiques ont rêvé d'occuper ces bureaux? Combien n'y sont restés que quelques mois, les quittant à regret, et combien d'autres s'y sont sentis piégés? C'est le mystère de ces endroits protégés dont les histoires sont gravées dans la cire des parquets et la rigidité des tentures. Mais ceux qui ne peuvent (ou ne veulent pas) s'y engouffrer ont toujours la possibilité de feuilleter, comme moi en ce moment, le livre truffé d'anecdotes de leurs différentes attributions et transformations. C'est un clin d'oeil à l'histoire de France, et c'est très instructif sur les tribulations de nos ministres assoiffés de politique.

mardi 30 décembre 2008

Fin d'année

Trois titres, omniprésents, à la une :
Gaza, Dieudonné, les hôpitaux.
J'ai fait un rêve étrange, ce matin, à 4h30, juste avant de me réveiller. Un rêve étrange et très instructif. Malheureusement, je ne me souviens pas des détails, mais seulement de la fin, qui me concernait plus particulièrement. C'était comme une longue procession. Il y avait plein de gens qui se rendaient quelque part, vers un stade ou un gymnase, pour un réglement définitif, un combat qui ne laisserait personne en vie. Tout le monde était calme, et il s'agissait surtout d'asiatiques. Une fois le combat commencé, à l'arme blanche ou au pistolet, il n'y avait pas d'issue possible, et c'était la mort pour tout le monde. Pour moi aussi. J'assistais au combat, mais je n'y participais pas, et puis les survivants se sont tournés vers moi et ont commencé à me tuer. Je ne souffrais pas, je voyais les autres s'avancer vers moi tout en me tuant. J'étais le dernier. Les autres s'entretuaient et me tuaient. Petit à petit je disparaissais, je mourrais, mais il n'y avait pas de coupure : je me retrouvais en plein soleil dans un chemin (en Touraine?) et je me suis réveillé.
Mourir ainsi, et ressusciter aussitôt, en plein soleil, n'est-ce pas le pied?

samedi 27 décembre 2008

Harold Pinter is dead

Harold Pinter, génie britannique, qui vient de mourir, et qui avait écrit le scénario de certains films de Joseph Losey, faisait une apparition dans l'un d'eux, "Accident" où il interprétait un type quelque peu loufoque que Dirk Bogarde, le "héros" du film, venait consulter sur les conseils d'un de ses amis, professeur comme lui à Oxford (Stanley Baker), afin d'intégrer certains programmes de télévision où Stanley Baker faisait des apparitions lui permettant de parler de "tout" (anatomie, astrologie, philosophie, baratinologie...).
Comme souvent chez Losey, et surtout durant toute cette période des années 60 qui vit l'éclosion de tout un cinéma européen d'une richesse inouie visant à nous faire comprendre que ce que nous disions ou faisions ne correspondait pas forcément à ce que nous pensions intérieurement (L'année dernière à Marienbad, La Notte, L'Heure du Loup...), au lieu de s'intéresser à ce que Bogarde désirerait faire au sein de la télévision, Pinter lui reparle carrément de la fille du recteur du collège d'Oxford, Francesca, avec laquelle Bogarde entretint une liaison, dix ans plus tôt.
Et Bogarde, médusé, qui ne se souvenait même pas de ce flirt de jeune professeur, en profite pour téléphoner à Francesca, à tout hasard, au cas où.... La scène des retrouvailles est courte mais mémorable. D'un chic extraordinaire, d'une émotion classieuse. Il faut dire que Francesca est jouée par Delphine Seyrig, au sommet de sa fascinante beauté. La bourgeoisie, ici, est à son comble : regards caressants, intérieurs soignés, et dialogues décalés. Ils parlent pour ne rien dire, et ce qu'ils disent ne correspond pas à ce que l'on voit sur l'écran. Du grand art, voulu par Pinter, le scénariste, et accepté par Losey, le réalisateur, sorte d'entracte surréaliste dans le film riche en non-dits d'une pourtant banale histoire d'adultère.
Un peu plus tard, après cette rencontre, Bogarde assiste à un match sportif en plein air, dans le cadre de l'université où il enseigne, et il se retrouve aux côtés du recteur, le père de Francesca. Il en profite pour lui dire qu'il a rencontré celle-ci à Londres, et qu'elle l'embrasse. Et le recteur, imperturbable, réplique "Embrassez-la donc pour moi, quand vous la reverrez!". C'est d'un cynisme incomparable, donné à froid comme la lame d'un couteau, c'est du Pinter pur-jus, et c'est magnifique. Récemment, c'est Woody Allen avec Match Point, qui a peut-être retrouvé cet esprit d'un cinéma malin qui nous tend un miroir pour nous interroger sur le reflet menteur que nous essayons d'imposer, quelquefois avec bonheur, aux personnes qui nous entourent.
Thank you, Harold.

mercredi 24 décembre 2008

La Baise en public

Renan Luce et Thomas Dutronc, mines réjouies et guitares virtuoses, se retrouvent sur la scène du Zénith pour chanter une chanson de Brassens dont le refrain entraînant évoque les "95% de femmes qui s'emmerdent en baisant".
A l'heure mondiale où les sexes d'hommes et de femmes s'affichent librement sur les sites et les blogs, il est rafraichissant de voir ces deux jeunes artistes se marrer en chantant ce classique.

La baise est interdite à la télé. Bien sûr, il y a tout un tas de colloques où d'éminents spécialistes nous parlent des bienfaits de la sexualité consentante, du danger du Sida et des élucubrations du coït parleur ("Je te préviens, dit-il, j'aime parler en faisant l'amour!") mais la baise est évoquée à demi-mots, comme ces adolescents qui, lorsqu'on les interroge, pouffent de rire si on leur parle de la masturbation.
Même Bernard Lavilliers, il y a peu, un dimanche midi au journal télé, s'énervait en constatant qu'on n'a plus le droit de rien faire : ni boire, ni fumer, ni se payer une petite ligne de coke sans se retrouver banni de la bonne société moralisatrice et hypocrite. Mais je ne l'ai pas entendu dire "Bientôt, on n'aura plus le droit de baiser!". Pourtant, ce beau mec viril et bien chantant, n'est pas un adepte de la langue de bois.
Des fois, en dehors des humoristes qui en rajoutent à la pelle pour que l'on s'extasie devant leurs mots d'esprit, quelqu'un (quelqu'une, en l'occurrence) lance une petite phrase qui vient rejoindre la candide effronterie de Brassens. A un "Vivement dimanche" la pétulante Victoria Abril, en répondant à Drucker qui lui demandait comment elle se comportait, enfant, avec ses frères et soeurs à propos de la nudité, elle répondit "Il n'y avait que des chattes chez nous!". Un soupçon de fraîcheur dans un monde où certaines élites veulent faire la morale sur la baise, mais n'hésitent pas à plumer sans vergogne de simples épargnants qui n'ont pas toujours le mode d'emploi des transactions boursières.

Dans le très beau film de Joe Wright "Atonement", le mot CON a une importance fondamentale. Mais il ne s'agit pas d'un personnage odieux ou écervelé, mais bel et bien du sexe de la femme aimée. Ce mot, écrit sur papier par le chevalier servant de la belle, provoquera le drame.
Dans un des épisodes de "Sex and the city", le CON de Charlotte faisait l'objet d'un tableau en gros plan, parmi d'autres CONS, qu'un public amateur de belles couleurs venait dévorer des yeux, remplis d'admiration et de gourmandise.
Mais en France? Où est passé le CON? Ce mot est-il trop cru, trop brutal?
Gainsbourg n'est plus là pour en faire une chanson. Dommage. Il nous reste toujours les rimes de Brassens et l'inébranlable ZIZI du génial Perret.

mercredi 17 décembre 2008

Je retournerai à Venise

Dans une pertinente interview accordée à PREMIERE, Vincent Lindon évoque ces amis pour lesquels on s'enflamme pendant quelques années où ils paraissent indispensables, et puis, sans raison apparente, que l'on n'appelle plus, que l'on ne voit plus, que l'on n'embrasse plus. Plus du tout.
Je retournerai à Venise.
Je retournerai sur le lieu de mon crime. J'emménerai ma copine, la seule qui puisse supporter mes carences sexuelles. Je m'engloutirai dans les eaux sales de la lagune pendant qu'elle se laissera bercer par un beau gondolier. Nous retournerons au même restaurant où le patron, blagueur, avait ajouté du piment dans mes pâtes pour réveiller une ardeur qui lui semblait bien vacillante devant une femme si bien parfumée.
Contrairement aux amis dont on se sépare sans connaître le pourquoi du comment, je ne veux pas oublier Venise. On n'oublie pas la découverte d'une ville qui correspond à l'émerveillement de ses rêves d'enfant, où les palais ne sont plus en carton pâte mais en pierre ouvragée et en sculpture de marbre. Alice ne court plus après son lapin frondeur, elle se balade dans les ruelles interminables, éblouie de se trouver perdue de places en places entre des ponts qui se succèdent sans jamais se ressembler.
L'interview de Vincent Lindon me donne un parallèle à la fragilité de nos amitiés et du souvenir que l'on en garde. Jeanne Moreau arrivant dans une ville dépourvue de touristes (Eva) sous l'oeil clinique de la caméra de Joseph Losey et voilà que la bobine de cinéma repart à l'envers. Venise en hiver, Venise en noir et blanc, et Venise étouffée de touristes en ce mois de juillet où je renouerai avec cet impensable désir de faire l'amour à une ville qui ne m'a jamais oublié.

vendredi 12 décembre 2008

Kylie

"Come into my world" chante Kylie Minogue.
Parfums, calendriers, lingeries, CD, DVD, etc. son monde est le reflet du glamour et du show-bizz. Son dernier concert, enregistré à Londres, vient de sortir en DVD. C'est le triomphe de la pyrotechnie. Loin de la spontaneité des premières performances, la star perfectionne un point de non-retour. L'humour est encore perceptible, mais pour combien de temps? Sous le maquillage (superbe) on sent une certaine crispation. Le marketing overdose va-t-il l'emporter sur le music-show?
On connait le trajet de cette courageuse Australienne : les premiers succès, en 1986, à 18 ans, avec le feuilleton "Neighbours" où elle jouait le rôle d'une garagiste (!). Ensuite, un an plus tard, la révélation avec la reprise du tube "Locomotion". Maisons de disques, enregistrements, carrière prometteuse, duo efficace avec Nick Carve, tendances rock et tendances pop, demis-succès, critiques mitigées....
Et puis, en 1999, un nouveau contrat avec Parlophone, un clip avec un short ultra court et ultra sexy, la nouvelle Kylie réapparait, imposant au monde entier son image glamour ultra-sophistiquée mais néanmoins "bonne copine" qui se trémousse en rigolant, et accumule les disques d'or et les récompenses. Opérée d'urgence en 2005 d'un cancer du sein, elle se bat et, guérie, recompose une femme d'affaire omniprésente (parfumerie, exposition de tenues diverses, contrat avec H&M, ouverture de magasin à Shangai, etc...).
Lutte physique, lutte morale pour se maintenir au top, combat permanent dans un monde de fric et de strass, la nouvelle Kylie peut compter sur un public versatile mais fidèle qui doit la rassurer lorsqu'elle se retrouve dans sa chambre d'hôtel, loin de l'énorme (monstrueux) artifice de l'électronique et des éclairs laser.